Si on transformait le plastique des océans en carburant pour bateaux ?
Pour nettoyer les océans du plastique qui les encombre, des chercheurs américains ont voulu aborder le problème autrement et ont réfléchi à la manière d'intégrer ce problème à la solution. C'est ainsi qu'ils en sont venus à proposer une idée inédite : transformer les déchets en carburant.
Les projets pour sauver nos océans de l'invasion plastique sont nombreux. Certains s'attaquent directement au plastique en le collectant au large, d'autres se tournent vers des idées d'éco-conception pour le revaloriser en le recyclant. Au-delà de la collecte de déchets proprement dite toutefois (une opération déjà bien compliquée), tous se heurtent à des défis de taille comme le transport du plastique ou encore son stockage, sans compter le fait que tous les plastiques ne sont pas recyclables. Pour contourner ces difficultés, une équipe de chercheurs américains ont avancé une solution peu commune : transformer les déchets plastiques en carburant là où il se trouve et s'en servir pour faire le plein des bateaux chargés du nettoyage.
L'équipe, composée de scientifiques issus de l'Institut océanographique de Woods Hole, de l'Institut polytechnique de Worcester ainsi que de l'université d'Harvard, a étudié en détail la faisabilité de cette solution. Pour transformer le plastique en carburant, ils préconisent l'utilisation de la liquéfaction hydrothermale, un procédé connu depuis 1920. Il consiste à chauffer le plastique entre 300 et 500°C, tout en lui appliquant une pression comprise entre 250 et 300 atm. Cette opération entraîne la dépolymérisation du plastique qui, en quelque sorte, va retourner à son état primaire d'hydrocarbure.
La liquéfaction hydrothermale offre un rendement d'au moins 90 %. Selon les calculs des chercheurs, cela est suffisant pour permettre à un navire correctement équipé de nettoyer une zone comme le continent de plastique dans le Pacifique Nord sans avoir besoin de se ravitailler en carburant. Modélisation à l'appui, ils ont aussi démontré qu'entre 230 et 11 500 tonnes de plastique pourraient ainsi être retirées des mers tous les ans.
Évidemment, tout n'est pas rose et si la liquéfaction hydrothermale a un rendement élevé, elle produit tout de même 5 % de déchets solides qu'il faudra soit stocker, soit brûler adéquatement. Le processus génère aussi des émissions carbones et, même si c'est loin d'égaler ce que dégagerait un navire collecteur faisant des allers-retours entre la terre et le large, cela reste un frein à son utilisation. Beaucoup de travail reste donc à fournir avant que cette solution ne devienne viable, mais pour autant, elle reste séduisante. Associée à d'autres solutions technologiques, il se pourrait bien qu'elle puisse sauver les océans.