Des mollusques connectés pour surveiller la pollution de l'eau

Des mollusques connectés pour surveiller la pollution de l'eau

Plusieurs méthodes existent pour surveiller la qualité de l'eau, mais toutes possèdent l'inconvénient de nécessiter des mesures périodiques avec comme conséquence un temps de réaction logiquement long, pas vraiment idéal en cas de pollution rapide. Pour pallier cet inconvénient, une toute jeune start-up arcachonnaise a développé une technologie unique utilisant des mollusques bivalves pour mesurer la qualité de l'eau en temps réel : la valvométrie HFIN (Haute fréquence, non invasive).

Originellement, la valvométrie, qui consiste à mesurer l'écartement des valves des mollusques pour en déduire leur état de santé, a été inventée dans les années 1970. On doit cependant l'idée d'en faire un instrument de mesure environnemental à Jean-Charles Massabuau, directeur de recherche émérite au CNRS : en quantifiant le comportement des animaux (amplitude d'écartement des valves, durée d'ouverture, croissance journalière du bivalve, rythme biologique, ou même agitation), lui et son équipe ont réussi à créer un outil de suivi précis de la qualité de l'eau.

Les mollusques sont surveillés grâce à des électrodes et des micro-aimants collés à leurs coquilles. On contrôle ainsi 24h/24 et 7j/7 plus d'une dizaine de paramètres physiologiques pour chaque animal, des relevés transmis par la suite à un centre de traitement distant. Là, les données sont traitées par divers algorithmes d'intelligence artificielle qui vont automatiquement en tirer des conclusions après les avoir analysés. En d'autres mots, la valvométrie HFIN permet non seulement un suivi à distance de l'évolution de la qualité de l'eau, mais également de la suivre en temps réel, et ce, de manière automatisée. Mieux encore, la solution est aussi annoncée comme étant « 10 à 100 fois plus sensible que les capteurs physico-chimiques » par ses inventeurs.

Mais si sur le papier, tout a l'air simple, le développement de cette technologie a tout de même nécessité plus de 12 ans de recherches dans le laboratoire EPOC (Environnement et Paléoenvironnement Océaniques et Continentaux) du CNRS et de l'université de Bordeaux. Tout d'abord, il a fallu trouver un moyen non invasif pour effectuer les relevés sans brusquer l'animal, ensuite développer une architecture informatique spécifique pour le système, mais aussi nourrir l'intelligence artificielle avec des millions de relevés issus de différentes espèces (la technologie fonctionne avec une quinzaine d'espèces : huîtres, bénitiers, pétoncles, etc.). Un long chemin parcouru qui s'est récemment concrétisé par la création de la start-up MolluSCAN-eye chargée de commercialiser ce savoir-faire unique au monde.

Par Andriatiana Rakotomanga