A Tahiti, on utilise l'océan pour climatiser un hôpital

Le climat équatorial régnant à Tahiti fait que la température sur l'île oscille généralement entre 24 et 30°C. Une météo plus que clémente à longueur d'année, mais qui appelle à un usage quotidien de la climatisation. Pour l'hôpital de Papeete, cette obligation se traduit par un gouffre écologique et économique que l'établissement a décidé de combler de manière créative : en exploitant l'eau puisée dans les profondeurs de l'océan.

La technologie permettant d'utiliser l'eau glacée qui s'y trouve pour alimenter un système de climatisation est appelée SWAC, pour Sea-water air conditioning (ou climatisation à l'eau naturellement froide, en français). Son fonctionnement, sur le papier du moins, est assez simple : on pompe l'eau glacée naturellement présente en eau profonde, puis on l'utilise pour refroidir un autre liquide à l'intérieur d'un échangeur – généralement, de l'eau également – qui, lui, va aller alimenter en froid les climatiseurs. Pour terminer, l'eau de mer, alors tiède, est rejetée dans l'océan, sans ajout ni détérioration.

Dans le cas précis du Centre hospitalier de la Polynésie française, l'eau est collectée à une profondeur de 900 mètres grâce à un réseau de canalisation long de 3,8 km. Elle arrive à une température de 4,7°C dans l'échangeur et, par contact, fait descendre l'eau de la climatisation à 7°C. Le principal avantage du système est qu'il va diminuer les besoins en énergie lié à la climatisation par 10. Ainsi, s'il fallait 9,2 GWh d'électricité auparavant à l'établissement public pour faire fonctionner à longueur d'année son impressionnant réseau de 1 600 climatiseurs, le SWAC va aujourd'hui permettre de descendre cette consommation à un "petit" 0,9 GWh. Évidemment, cela va sensiblement alléger la facture d'énergie de l'hôpital qui, selon les prévisions, peut tabler sur une économie de 350 millions de francs Pacifique chaque année, soit approximativement 2,9 millions d'euros.

Pour ne rien gâcher, les avantages écologiques du SWAC sont également nombreux. Il n'utilise pas de gaz réducteur de la couche d'ozone, ne rejette pas de polluant, et, comme on l'a vu, il est peu énergivore, ce qui va réduire d'environ un tiers l'empreinte carbone de l'hôpital. Reste son coût d'installation : 3,7 milliards de francs Pacifique (environ 31 millions d'euros) pour une durée de vie d'à peu près 30 ans. À ce stade, le retour sur investissement se fera donc dans 10 à 15 ans.

Par Andriatiana Rakotomanga