Préparer sa peau au soleil avec crèmes et comprimés : un mythe dangereux

Sur le papier, cela a tout de la bonne idée : à l'approche de la saison estivale et comme nous venons de passer plusieurs mois sans soleil, il semble opportun de préparer notre peau à bronzer. Compléments alimentaires, autobronzants, ou encore accélérateurs de bronzage nous promettent d'ailleurs tous un teint doré en toute facilité, garanti sans coups de soleil. Sauf que, tout comme nous l'avions déjà remarqué avec les séances d'UV avant d'aller au soleil, il s'agit là d'une fausse bonne idée.
L'illusion des compléments alimentaires
Le marché regorge de produits à base de bêta-carotène, de lycopène, ou encore d'astaxanthine, des molécules vantées comme étant capables de protéger la peau en fonçant notre carnation. L'idée est que, tout comme la peau produit naturellement de la mélanine pour nous protéger du soleil – c'est le principe du bronzage –, la foncer devrait avoir le même effet. C'est, hélas, un raccourci trompeur.
Réduits à leur plus simple expression, ces compléments alimentaires ne sont en réalité rien d'autre que des colorants : le bêta-carotène ? Un pigment qui donne leur couleur orange aux carottes et aux potirons. Le lycopène ? Un pigment naturel rouge que l'on retrouve dans les pastèques ou les tomates. L'astaxanthine ? Un colorant alimentaire que l'on extrait de certaines algues rouges et des crustacés. Tous ne font que colorer artificiellement la peau et n'ont rien à voir avec la vraie mélanine. Cela signifie que le teint hâlé qu'ils procurent aura beau être hautement esthétique, il ne confèrera aucune protection contre les dangereux ultraviolets du soleil. Pire, à cause de ce faux bronzage, on aura tendance à se surexposer au soleil en se croyant protégé.
Enfin, il faut aussi savoir que prendre ces compléments alimentaires n'est pas anodin. Le lycopène, par exemple, a un effet anticoagulant et peut s'avérer dangereux associé à des médicaments ayant le même effet. Le bêta-carotène, à haute dose, augmente quant à lui le risque de cancer du poumon, particulièrement chez les fumeurs et les ex-fumeurs.
Les boosters de bronzage, un vrai risque pour la santé
Plébiscités sur les réseaux sociaux où l'esthétique est roi, les accélérateurs ou boosters de bronzage ne sont pas avares de promesses : « Bronzage lumineux et uniforme », « Préparation de la peau au bronzage », « Bronzage plus rapide », de quoi séduire les amateurs de peau dorée qui exhale le soleil. En se penchant sur leur fonctionnement toutefois, il y a de quoi rester perplexe.
La plupart des accélérateurs de bronzage agissent en augmentant la photosensibilité de la peau, ou, formulé autrement, en rendant la peau sensible aux ultraviolets. On l'a vu, le bronzage n'est rien d'autre que la réponse du corps à l'agression des ultraviolets. Si on rend la peau plus sensible aux UV, on obtient une réponse plus rapide avec une production plus vive de mélanine, logique.
Sauf que cette stimulation s'accompagne d'un affaiblissement des défenses naturelles de la peau face aux agressions solaires, entraînant une augmentation significative des radicaux libres qui détériorent les cellules cutanées et accélèrent le vieillissement. Elle tend également à rendre la peau plus fine alors qu'en temps normal, l'épiderme a plutôt tendance à s'épaissir avec une exposition progressive au soleil. Cet amincissement permet aux ultraviolets de pénétrer plus profondément dans la peau malgré la mélanine. Résultat, les chances de formation de tumeurs cutanées augmentent, jusqu'à 4 fois, pour un temps d'exposition identique.
Certains boosters de bronzage, enfin, utilisent de la tyrosine, un acide aminé qui, entre autres, joue un rôle principal dans la production de mélanine. Si ce type de booster ne photosensibilise pas la peau, il n'en reste pas moins qu'il amplifie le sentiment de protection. Se pensant protégés, les utilisateurs s'exposent alors plus longtemps au soleil, baissant leurs gardes et oubliant les précautions d'usage face au soleil.
Gare au cocktail "soleil + autobronzant"
Tout comme les compléments alimentaires, les autobronzants ne font rien d'autre que donner une certaine coloration à la peau. Le bronzage obtenu de cette manière n'a ainsi rien de protecteur et ne prépare en rien la peau à une exposition prolongée aux rayons du soleil.
Le principe actif fréquemment utilisé dans les autobronzants se nomme le dihydroxyacétone. Il s'agit d'un glucide simple qui réagit avec les acides aminés des cellules mortes de l'épiderme pour former des pigments bruns appelés "mélanoïdines". Ce sont eux qui donnent ce teint hâlé plus ou moins réussi. Quelques heures suffisent pour cela, mais il s'agit d'un bronzage éphémère qui se dissipe vite (en 5 à 7 jours).
En soi, le dihydroxyacétone ne représente aucun danger pour la santé, même s'il est tout de même vivement conseillé de ne pas l'inhaler et d'éviter les muqueuses. Sous l'effet de la chaleur toutefois, le dihydroxyacétone est susceptible de se dégrader en libérant du formaldéhyde, un composé organique volatil (COV) allergène, irritant et classé comme cancérigène possible.
Un usage fréquent, enfin, expose à un dessèchement chronique de la peau ainsi qu'à un stress oxydatif accru, augmentant la présence de radicaux libres dans la peau dans les 24 heures qui suivent l'application. Une série de conséquences qui, finalement, va accroître la sensibilité de la peau au soleil.
Préparer notre peau à affronter le soleil, une nécessité ?
La réponse est sans ambiguïté : non, il n'est absolument pas nécessaire de préparer notre peau à mieux supporter le soleil, ou, d'ailleurs, à mieux bronzer. En outre, il n'existe aucun moyen de le faire, que ce soit par la prise de compléments alimentaires ou par l'application d'un autobronzant.
Par définition, le bronzage est une réponse profonde de notre organisme pour protéger notre peau contre les agressions des rayons ultraviolets. Bronzer au soleil n'est donc pas un acte anodin, mais une activité dangereuse qui expose notre peau à des risques, allant du simple coup de soleil à la formation de mélanome.
Il faut également savoir que le bronzage naturel que l'on obtient en multipliant les activités extérieures durant l'été n'est pas si protecteur que ça. Les scientifiques s'accordent à dire qu'il serait équivalent à un niveau de SPF 2 à 4, là où une crème solaire offre une protection supérieure à 30.
Finalement, c'est tout simple : pour bronzer sans danger, il est inutile de penser à préparer sa peau d'une quelconque manière. La bonne vieille crème solaire suffit amplement une fois à la plage !