La pêche à la dynamite, un fléau dévastateur

Si pendant longtemps, cannes à pêche et filets capturaient "équitablement" les poissons, ces méthodes traditionnelles semblent être devenues dépassées dans certains pays. A la place des vers de terre et des hameçons, dynamite et autres explosifs font désormais partie du régime des poissons.
La pêche à la dynamite, un fléau dévastateur

Il est loin l'époque où Némo et Ariel pouvaient se balader tranquillement sous l'océan. Depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les fonds marins ne dansent plus au rythme des courants, mais à celui d'explosifs en tout genre. Plus rentable, mais plus destructrice que la pêche traditionnelle, la pêche à la dynamite, ou du moins à l'explosif, se pratique dans pas moins de 40 pays dans le monde. Zoom sur une technique de pêche qui met en péril tout l'écosystème marin.

Soixante ans de pratique barbare

C'est vers la fin des années 1950 que la pêche à l'explosif, notamment à la dynamite, s'est répandue. Elle consiste à lâcher un engin explosif sous l'eau afin que la déflagration tue ou assomme les poissons qui flottent alors à la surface au bout de quelques minutes.

Très naturellement, c'est vers la dynamite qu'on s'est tourné en premier, mais au fil des années, les méthodes ont varié en tendant de plus en plus vers l'artisanal : plastic, fulminate de mercure, pétards au magnésium, cheddite, et même têtes d'allumette, la liste des explosifs est longue et certains, comme la cheddite, sont très faciles à fabriquer.

D'une manière générale, les pêcheurs fixent leurs explosifs à un poids (du plomb ou plus simplement, une pierre) pour qu'ils atteignent une bonne profondeur. Ensuite, soit ils allument une mèche, soit ils utilisent une source électrique pour déclencher l'explosion. Une explosion sous l'eau est cinq fois plus importante que sur la terre ferme, tuant net les poissons ou infligeant des séquelles si importantes (hémorragies viscérales, encéphaliques, éclatement des organes internes, etc.) qu'ils en meurent dans les minutes qui suivent.

Une technique motivée par l'appât du gain

Dix fois plus rentable que la pêche traditionnelle alors qu'elle ne nécessite que peu d'effort et de temps, la pêche à la dynamite trouve des adeptes partout, aussi bien dans des pays pauvres comme la Tanzanie, que dans des contrées comme le Liban, la Libye, les Philippines, ou encore l'Indonésie. Elle est aussi pratiquée en Europe, notamment au Monténégro.

Aveuglés par le gain immédiat, ces terroristes des fonds marins continuent leur pratique même en hiver, période de reproduction de la plupart des poissons. Résultat, le stock de poissons a de plus en plus de mal à se renouveler, surtout avec l'action conjuguée de la surpêche.

Il faut savoir aussi que cette pratique n'est pas sans risque et que les poissons ne sont pas les seules victimes de la pêche à la dynamite : les histoires de pêcheurs aux bras arrachés, aux mains amputées ou même qui y laissent leur vie ne se comptent plus. La pratique, pourtant, trouve encore des adeptes.

Les impacts des explosifs sur l'écosystème sous-marin

La faune est le premier martyr de la pêche à l'explosif. Poissons, comestibles ou pas, crustacés, œufs et larves, plancton, tous sont anéantis sans distinction par les ondes de choc des explosions. Il en va de même pour les récifs coralliens, lieux de vie du quart des créatures marines, qui se fragilisent, voire se brisent et meurent. Ce qui entraîne une diminution des lieux de reproduction, des abris et des territoires de chasse pour toutes les espèces marines, et pas seulement les poissons.

L'utilisation répétée d'explosifs dans une zone équivaut ainsi à littéralement stériliser la mer, anéantissant toute vie dans un rayon plus ou moins grand. A savoir que 200 grammes de cheddite tuent toute vie dans un rayon de 10 mètres et affectent tout être aquatique dans un rayon de 50 mètres. Pour un bâton de dynamite, c'est 250 mètres.

Enfin, le gaspillage qui accompagne la pêche à l'explosif est révoltant. Seule en effet une petite partie des poissons morts remonte à la surface. Le reste, jusqu'à 10 fois plus, coule sans que les pêcheurs ne puissent les récupérer. Un gâchis consternant auquel il serait grand temps de mettre fin.

Par Andriatiana RakotomangaPublié le 04/04/2019