L'aplysie, un lièvre de mer qui adore manger les algues
Les animaux étonnants ne manquent pas dans le milieu marin. Plus ou moins colorés et aux formes étonnantes, leur existence est parfois mystérieuse. Parmi ces animaux étrange figure l'aplysie, appelé communément "lièvre de mer". Herbivore comme notre ami des champs à grandes oreilles, sa silhouette l'évoque légèrement… mais la comparaison s'arrête là ! Découvrons ensemble ce petit gastéropode.
Pourquoi appelle-t-on l'aplysie un lièvre de mer ?
Quel nom vernaculaire surprenant pour un gastéropode marin ! Au-delà du fait que l'animal grignote la verdure océane, il y a une autre raison à cette appellation. En effet, ces espèces sont dotées de rhinophores rappelant les grandes oreilles du lièvre. Tout simplement !
Et si vous vous demandez ce qu'est un rhinophore, il s'agit de l'organe sensoriel (comme les "antennes" des escargots et des limaces) situé à l'avant de la tête, dont tous les nudibranches sont dotés. Il est vrai que, finissant le corps de ce mollusque sans coquille (il en a une, mais interne), au dos bombé et à la tête légèrement effilée, ces grands appendices évoquent vaguement la silhouette d'un lapin.
Un lièvre de mer présent sous toutes les latitudes
Ce petit gastéropode marin, qui peut revêtir différentes formes, plus ou moins excentriques et colorées, se trouve dans le monde entier. Donc, sur les côtes de l'Hexagone. C'est ainsi d'ailleurs qu'il a créé l'émoi du côté de Pornic, où une bestiole bizarre a été trouvée sur la plage après une tempête. Morte, malheureusement, elle mesurait une vingtaine de centimètres. Entre « limace géante » et « éclair au chocolat », certains ont fini par identifier cet objet marin non identifié, et il s'agissait, fort probablement, de l'aplysie. Cela nous a permis de confirmer au passage que cet animal était réellement présent sur les côtes françaises.
L'aplysie sur le littoral français
L'aplysie se trouve tant côté méditerranéen qu'atlantique. Si vous souhaitez l'observer, imaginez-vous plutôt une grosse limace brune, pas aussi atypique que le Glaucus atlanticus . Elle peut atteindre 40 centimètres de long. Mais en France, elle fait plutôt 8 centimètres. Avec deux gros tentacules évoquant un lièvre. Elle évolue à une très faible profondeur, là où il y a des algues. Et se nourrit en les léchant avec sa langue râpeuse et cornée, la radula.
En métropole, vous trouverez principalement quatre espèces. Aplysia punctata ou lièvre moucheté, Aplysia deplians ou lièvre commun, Aplysia fasciata ou Aplysie fasciée et Aplysia parvula ou Aplysie naine. Ou encore des Aplysiidae qui sont également des lièvres de mer, Burssatella leachii ou lièvre de mer effiloché et Notarchus punctatus ou Aplysie à pointes.
Un lièvre moucheté
Un drôle de gastéropode ailé qui se prend pour une seiche
L'aplysie, en bon gastéropode marin qu'elle est, rampe comme une limace. Mais là où elle peut vous surprendre, c'est qu'elle nage fort élégamment par ailleurs ! Elle est en effet munie de jolies "ailes" qu'elle déploie pour onduler avec aisance dans l'eau. Extensions de son corps, elles sont relevées au-dessus du corps en temps normal.
Mais, non contente d'être un lièvre de mer, d'avoir des ailes et nager comme un poisson, l'aplysie possède le même moyen de défense que la seiche : l'encre ! Lorsqu'il se sent menacé, l'animal émet en effet un jet d'encre violette, pour désorienter ses prédateurs. Notamment les homards, qui en sont friands.
Ce moyen de défense est particulièrement élaboré puisque, outre le fait de projeter de l'encre comme le font certains céphalopodes, il émet également un liquide appelé "opaline" à partir d'une glande distincte. C'est une substance blanche et visqueuse servant à leurrer ses prédateurs qui le prennent pour de la nourriture et perturbe leurs organes olfactifs. Ce mode de défense lui a valu les surnoms poétiques de « pisseuse de vin rouge » et « pisse-vinaigre ». Nous lui souhaitons la bienvenue dans la catégorie des animaux marins les plus atypiques.
Comme les escargots et les limaces, l'aplysie est hermaphrodite
Lors de l'accouplement, les animaux se servent à tour de rôle de leurs deux sexes. Et un accouplement entre deux individus en attire d'autres, ce qui finit par former un amas où les animaux se servent simultanément de leurs attributs mâles et femelles.
Les œufs sont pondus tous les deux ou trois jours durant 7 mois, dans des champs d'algues. Une seule ponte peut contenir jusqu'à 67 millions d'œufs ! Les larves qui émergent sont dotées d'une carapace et flottent dans le plancton avant de retrouver le tapis protecteur des algues pour finir leur croissance et leur métamorphose. L'individu sera mature et prêt à se reproduire à 2 mois. Un cycle de vie ne dure guère plus de 7 mois, se terminant rapidement après la période de reproduction.
Un animal qui intéresse la science
Ce petit animal à la coquille interne bien cachée sous son manteau, est étudié de très près dans le domaine des neurosciences. Ses neurones géants sont en effet parfaits pour l'étude des transmissions synaptiques. En outre, il a été découvert que son encre contenait des substances cytotoxiques (des cyanobactéries). Ce qui en fait un sujet d'étude dans le domaine de la recherche d'une substance anticancéreuse.
Mais gardons surtout en tête la grâce du lièvre marin lorsqu'il déploie son manteau pour nager harmonieusement parmi l'herbier marin. Avis aux amateurs de plongée sous-marine ou de snorkeling !