Les îles artificielles sauveront-elles l'humanité ?

Le réchauffement climatique et la montée des eaux menacent les zones côtières sur lesquelles vivent 60% de la population mondiale. Le Marin étudie aux Pays-Bas la construction d'îles flottantes artificielles modulaires, dans la tradition nationale de conquête de territoire sur l'océan. Mais de nombreux défis sont à relever.

Pourquoi des îles artificielles ?

Il peut y avoir de nombreuses raisons à vouloir construire des îles artificielles. Dans certains cas, il s'agit de s'extraire de l'autorité des États existants, soit par motivation idéologique (comme le projet du Seasteading Institute en Polynésie française) ou opportuniste (comme la Principauté de Sealand).

Mais il s'agit dans d'autres cas d'une manière de lutter à la fois contre la concentration des populations le long des côtes et contre la montée des eaux liée au réchauffement climatique. C'est le cas du projet d'île flottante du MARIN (Maritime Research Institute Netherlands).

Les Pays-Bas ont une longue tradition de conquête de territoire sur la mer, par un système de digues et de canaux. Mais les territoires ainsi gagnés sont à une altitude nulle, ce qui les rend menacés par la montée des eaux. Cette menace ne concerne pas les seuls Pays-Bas, loin s'en faut ! C'est en tout cas ainsi qu'Olaf Waals, chef de projet pour Marin, justifie le projet de son institution.

Quelle est la solution adoptée par le MARIN ?

La solution proposée par le Marin est une île flottante. Contrairement aux solutions de type plate-forme pétrolière qui sont posées sur le fond marin, cette plate-forme serait simplement arrimée au plancher et, éventuellement, à la côte. Elle pourrait ainsi suivre les mouvements de l'eau.

Cette solution repose sur l'utilisation de triangles modulaires, reliés entre eux de manière flexible. Les surfaces ainsi formées peuvent aller jusqu'à 5 km de large pour 87 triangles de formes différentes. Même si l'installation de villes sur ces surfaces peut être envisagée, il s'agirait davantage, dans l'immédiat, d'y mettre en place des installation industrielles, comme des espaces de stockage, des fermes aquacoles ou de culture d'algues, ou encore des centres de maintenance d'installations offshore.

Les défis à relever

Les défis à relever pour mettre en œuvre une infrastructure de ce type sont nombreux. Tout d'abord, affronter le milieu marin en soi n'est pas une gageure. Comment l'île articulée va-t-elle résister aux courants, aux vents et à l'assaut des vagues ? Et ce, sur le long terme, car il ne suffit pas simplement d'envisager la maintenance ou le remplacement d'un triangle, mais également de ce qu'il y a dessus.

Comme ces îles sont éventuellement prévues pour être installées loin des côtes, il faut également prévoir leur autonomie énergétique, ce qui est possible par les différents types d'énergies marines. De même, un recyclage des eaux usées et éventuellement des déchets devra être étudié.

Comme le but affiché est la lutte contre les effets du réchauffement climatique, des études sont également entreprises pour connaître les interactions de ces grandes structures flottantes sur l'environnement marin.

L'institut néerlandais a mis en place un bassin dans lequel un modèle réduit de l'île, de 6 mètres par 8, est mis à l'épreuve. Des rafales de vent et des vagues de 15 mètres sont ainsi simulées et infligées à la structure.

Ces tests doivent durer encore trois ans, et Marin est d'ores et déjà en discussion avec la ville de Haarlemmermeer et l'aéroport de Lelystad. La première mise en service est prévue à un horizon de 10 à 20 ans.

Par Charles LorrainPublié le 22/01/2018