En Polynésie, les libertariens à la conquête de l'océan
Vous pensiez que le réchauffement climatique était dû, ou pour le moins lié aux règles économiques actuellement en vigueur ? Et bien des libertariens de la Silicon Valley affirment faire cohabiter la liberté économique et la lutte contre le réchauffement climatique et ses effets.
Comment ? Ils envisagent la construction de plate-formes flottantes modulaires avec des bureaux et des habitations, sur lesquelles les entrepreneurs pourraient mener à bien leurs projets sans entrave réglementaire ou fiscale. Autonomes en énergie, elles auraient par ailleurs l'avantage de s'accommoder fort bien de la montée des eaux, contrairement à certains états insulaires comme les Tuamotu qui sont condamnés à plus ou moins long terme. Les concepteurs affirment de plus que leur présence à la surface permettrait de réduire la température des eaux environnantes et ainsi limiter le blanchiment des coraux qui ceignent le lagon. Les projets sont déjà bien avancés et la construction du premier prototype pourrait démarrer très bientôt, dès 2018 s'il vous plaît ! L'inauguration pourrait avoir lieu dès 2020.
Mais attention, si ce projet est porté par des libertariens, c'est qu'il y a un autre objectif que la protection de l'environnement. Les libertariens (à ne pas confondre avec les libertaires) sont un courant de l'anarchisme classé à droite. Ils prônent une liberté totale, notamment en matières économique et sociétale, et visent, pour les plus radicaux d'entre eux, à éradiquer toute forme d'État.
Ces îles flottantes pourraient donc devenir une concrétisation de leur idéologie politique en devenant des cités autonomes, indépendantes de tout état existant. Parmi les financeurs de ce projet, on retrouve notamment Peter Thiel, l'un des fondateurs de PayPal, et Patri Friedman, petit-fils de Milton Friedman, théoricien bien connu du modèle néolibéral, à la tête du Seasteading Institute, l'association qui porte ce projet.
Pourquoi une cité flottante plutôt qu'une cité terrestre ? Parce que, selon les promoteurs du projet, les états dominent déjà toutes les terres émergées alors que les océans, dans leur majorité n'appartiennent à personne. Et pourquoi la Polynésie Française pour établir le prototype ? Notamment parce que ce Territoire d'Outre-Mer possède des infrastructures intéressantes en termes de connexion numérique et de services disponibles. Et, d'un point de vue juridique, la Polynésie dispose d'une grande autonomie vis-à-vis de la Métropole, ce qui permet de passer plus facilement des accords pour régler les nombreux problèmes juridiques posés par un tel objectif.
Il s'agit pour le moment d'un prototype. L'objectif déclaré du Seasteading Institute est bien, à plus ou moins long terme, de créer des cités de grande taille indépendantes de tout État. Ce projet n'est pas sans rappeler le projet japonais de cité sous-marine Ocean Spiral, ce dernier n'ayant toutefois pas de visée politique déclarée.