Le nettoyage mécanique des plages, la fausse bonne idée

Considéré comme un mode d'entretien efficace du bord de mer, le nettoyage mécanique est actuellement largement utilisé par les communes littorales pour avoir des plages propres et lisses. Pourtant, bien que possédant de réels avantages, cette pratique dégrade tout autant le littoral qu'elle ne le nettoie.
Le nettoyage mécanique des plages, la fausse bonne idée

Pour assurer la propreté de leurs plages, surtout sur les longs littoraux très fréquentés, les communes n'ont souvent d'autres choix que d'avoir recours au nettoyage mécanique. Il faut reconnaître que l'utilisation de machines motorisées économise temps et ressources, sans parler de leur redoutable efficacité. En revanche, pas sûr que l'environnement apprécie.

Des engins très efficaces

Le nettoyage mécanique d'une plage est une opération consistant à utiliser des engins pour la débarrasser de ses déchets, notamment en se servant d'une cribleuse et d'une ratisseuse. La première, issue du monde du minage et du BTP, est un gros tamis le plus souvent remorqué par un tracteur, même s'il existe aussi des modèles à mains et motorisés. Son travail est de filtrer tout le sable qu'elle ramasse, retenant les déchets comme le plastique ou les mégots qui polluent, et laissant s'échapper un sable propre et uniforme.

Passant avant la cribleuse, la ratisseuse est elle aussi un engin tracté. Avec ses dents, elle racle la plage en profondeur afin d'en faire remonter tous les déchets qui pourraient s'y cacher et que la cribleuse devra donc récupérer par la suite. Selon l'étendue du chantier, certaines communes optent carrément pour des pelleteuses pour remuer le sable.

Au sortir de ce lifting, la plage est toute lisse et attrayante, pile ce que le touriste en mal de bord de mer souhaite trouver. Hélas, avec cette pratique, l'Homme sacrifie encore une fois à l'esthétique ce que la nature a mis des millions d'années à construire.

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Appauvrissement des écosystèmes

Déjà, en triturant et en raclant ainsi impitoyablement le sable, les engins nettoyeurs de plage endommagent gravement l'habitat de la petite faune littorale. Privés d'abri et de zone de reproduction, mollusques, minuscules crustacés, vers et même oursins meurent à petit feu, provoquant ainsi un déséquilibre dans la chaîne alimentaire.

La collecte mécanique des déchets ne fait également pas le tri entre les vrais déchets (pollution plastique, emballages, etc.) et la laisse de mer faite d'algues, de bois flotté et de petits animaux marins en décomposition. Collectés sans discernement, ces débris forment pourtant un écosystème complet et très important. Ils servent d'abri et de garde-manger, et contiennent une vraie biodiversité. Les oiseaux qui peuplent nos plages ont en également besoin, car quand ils n'y cherchent pas leur nourriture, ils s'en servent pour faire leurs nids.

Par ailleurs, le cycle reproductif des oiseaux nichant dans le sable peut être gravement affecté par le nettoyage mécanique d'une plage. La sterne naine par exemple ne pond que 2 à 3 œufs par an et pourtant, il arrive fréquemment que leurs nids soient détruits par inadvertance lors des opérations de nettoyage.

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Fragilisation du littoral

Les dégâts du nettoyage mécanique des sables ne touchent pas que les écosystèmes littoraux. Avec le volume de sable qu'elles mettent en mouvement par exemple, les machines fragilisent aussi le terrain littoral et favorisent alors l'érosion du trait de côte. Et que dire quand on s'en sert pour nettoyer des dunes, la chose à ne surtout pas faire : un passage à la cribleuse les décapite tout bonnement et les rend encore plus susceptibles de s'éparpiller aux quatre vents. Pour ne rien arranger, cela va aussi empêcher la pousse d'herbes qui, si la plupart sont méconnues, protègent pourtant les dunes de l'érosion éolienne.

Au final, même si les arguments en faveur du nettoyage mécanique des plages sont réels, mieux vaut toujours privilégier le nettoyage manuel. C'est une méthode douce et pas si chronophage que ça en s'y prenant bien, puisqu'il est tout à fait possible d'inciter à la collecte avec pédagogie en installant, par exemple, des bacs à marée.

Par Andriatiana RakotomangaPublié le 08/09/2020