La vélelle, un animal planctonique qui flotte au gré du vent

Elle vous serait peut-être inconnue sans ses échouages de plus en plus fréquents sur les plages françaises. La vélelle, une petite colonie formée de polypes sans moyens de propulsion propre, y est parfois poussée par des vents trop violents. Zoom sur cet animal qui en fait en est plusieurs, et sur son mode de vie.
La vélelle, un animal planctonique qui flotte au gré du vent

Rien qu'en 2023, des échouages massifs de vélelles ont eu lieu sur le littoral des Alpes-Maritimes, du Finistère et de la Gironde. Les promeneurs ne peuvent qu'être surpris en découvrant ce qu'ils croient dans un premier temps être des méduses, mais qui n'en sont pas. Même si elles sont appelées, dans certains secteurs, "méduses bleues" ou "méduses voilettes". Mais alors, que sont donc ces mystérieux petits organismes bleus envahissant certaines plages, parfois par milliers ? Laissez-nous vous conter l'histoire de ces petites bestioles aquatiques dépassant rarement les six centimètres de long.

Velella velella, une fausse méduse

Lorsqu'on l'aperçoit, son aspect gélatineux évoque immédiatement la méduse. Appartenant comme celle-ci à l'embranchement des cnidaires, la vélelle s'apparente pourtant plus à la redoutable physalie, dont elle n'a heureusement pas la dangerosité. Les plus grandes que l'on puisse observer ne dépassent pas huit centimètres de long pour trois de haut.

Cet organisme pélagique ovale est un pleuston, c'est-à-dire qu'il flotte en surface. Il ressemble à un petit vaisseau dont n'émerge de l'eau que la voile rigide, de forme triangulaire. À sa base, un disque rainuré dont le bleu est plus ou moins foncé. Un flotteur permet à notre minuscule radeau de dériver au gré du vent. Car la vélelle ne se déplace pas de façon autonome. Raison pour laquelle elle peut se retrouver sur les plages, ce dont elle se dispenserait sûrement bien.

La vélelle, une colonie bien organisée

Nous vous parlions d'un organisme et non d'un animal. En effet, la vélelle se différencie de la méduse sur ce point. C'est un hydrozoaire, autrement dit une colonie de polypes spécialisés agglomérés, portés par le disque cartilagineux dont nous parlions plus haut. Ces polypes sont très bien organisés, ce qui fait que notre vélelle se développe, se nourrit et se reproduit parfaitement.

Sous le disque se situent des rangées de polypes reproducteurs et de polypes pêcheurs et urticants. Les cnidocytes (petits harpons) de ces derniers saisissent leurs proies pour les ramener à l'unique polype nourricier doté d'une bouche, le gastérozoïde. La vélelle est planctophage, se nourrissant de microorganismes.

Elle constitue, quant à elle, un mets de choix pour le poisson-lune, le nudibranche (une limace de mer) et la janthine (un petit gastéropode de couleur violette).

Le polype asexué se transforme en méduse pour la reproduction

La différence entre un polype et une méduse tient dans le fait que le premier est cylindrique, asexué et attaché, quand la seconde a une forme de cloche, est sexuée et nage librement.

À certains stades de leur développement, certaines méduses peuvent se retrouver à l'état de polypes. Inversement, la vélelle vit un stade de méduse. Au moment de la reproduction, les gonozoïdes, ou polypes reproducteurs, vont générer de petites méduses, parfois appelées Chrysomitra, de 2 ou 3 millimètres tout au plus. Ce sont ces petites cloches qui vont libérer des gamètes mâles et femelles. Après fécondation, des larves apparaîtront qui finiront par former de nouvelles colonies asexuées.

vélelle

Inoffensive pour l'humain, mais à manipuler avec précaution

Si la vélelle est légèrement urticante, elle n'a pas la réputation d'être dangereuse pour l'Homme. Au pire, peut-elle légèrement irriter la peau si elle est saisie au niveau des cnidocytes. Mais il convient de ne pas porter ses mains à la bouche ou aux yeux si vous en avez touché une. Certaines personnes (les enfants, notamment) peuvent malgré tout présenter une réaction allergique.

Dans tous les cas, il vaut mieux éviter de la manipuler, car elle peut être confondue avec d'autres espèces. Notamment avec physalia physalis et porpita porpita dont elle partage la couleur et le biotope. La porpite n'est pas dangereuse. Munie de tentacules bleus, elle se différencie de la vélelle par sa forme ronde, son disque flottant (ou pneumatocyste) et son absence de voile. En revanche, la physalie, appelée également "galère portugaise", est extrêmement urticante. Comme la porpite, elle se différencie de la vélelle par l'absence de voile. On remarque qu'elle a en contrepartie un flotteur de 10 à 30 centimètres. Les tentacules dont elle est dotée sont également plus longs, pouvant atteindre plusieurs mètres.

Attention, odeur pestilentielle !

Il est possible de voir une jolie colonie bleue arriver près des plages, les vagues charriant des milliers de vélelles, jusqu'à les laisser s'échouer sur les plages. C'est impressionnant. Et on a forcément la curiosité d'aller voir de plus près. Ce qui n'est peut-être pas une bonne idée, car il faut savoir que la vélelle dégage une odeur nauséabonde lors de sa décomposition. Heureusement que celle-ci ne dure pas dans le temps. Au bout de quelques heures, il ne reste plus que la partie cartilagineuse. Il est donc conseillé d'éviter le moment de la dégradation, sous peine de devoir supporter un parfum très peu agréable !

Par Estelle-Sara SoldnerPublié le 31/01/2024