Ces déchets nucléaires entreposés en mer

On dit beaucoup de bien de l'énergie atomique, le miracle des temps modernes. Ce que l'on dit moins toutefois, c'est que l'exploitation à outrance de cette puissance, que l'on ne maîtrise encore que peu, produit des résidus dont on ne peut que difficilement disposer. Et devinez où ils finissent ? Dans les océans bien sûr !

L'ennui avec le nucléaire, c'est qu'il produit des déchets tout du long de son exploitation. Et l'on ne parle pas ici de tessons de bouteilles ou de morceaux de plastique : on parle de résidus irradiés qui prennent, selon les opérations, des dizaines voire des milliers d'années à se dissoudre.

Les déchets issus du nucléaire

L'industrie nucléaire n'arrête pas de produire des résidus et des déchets dangereux. Les mines d'uranium, par exemple, produisent des roches irradiant du radium 226, du thorium 230 ou encore du protactinium 231, des éléments hautement radioactifs à vie longue. L'enrichissement de l'uranium, lui, produit de l'uranium appauvri, tandis que l'électronucléaire crée d'innombrables déchets dont les très intensément radioactifs produits de fission dont la période radioactive va de 5 à 100 ans.

D'une manière générale, l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique) définit le déchet nucléaire comme étant "toute matière pour laquelle aucune utilisation n'est prévue, et qui contient des radionucléides en concentrations supérieures aux valeurs que les autorités compétentes considèrent comme admissibles dans des matériaux propres à une utilisation sans contrôle". Cela inclut donc l'eau utilisée pour refroidir le réacteur, par exemple, ou encore les gants et les combinaisons irradiées.

L'entreposage en mer

Les déchets nucléaires peuvent être entreposés en surface, sous terre ou immergés dans des piscines spéciales. Dès les années 50 néanmoins, et ce bien avant que les solutions d'entreposage citées un peu plus haut n'aient été envisagées, les pays exploitant déjà l'énergie nucléaire se sont délestés de leurs déchets radioactifs en mer. L'idée était alors de laisser leur radioactivité se diluer dans l'eau.

C'est ainsi que des déchets résultant des centrales nucléaires furent coulés dans du béton ou même simplement confinés dans des fûts avant d'être délibérément jetés un peu partout dans les mers et les océans.

Où sur la carte ?

Les États-Unis ont ouvert le bal en 1946 en larguant leurs fûts pas loin de l'État Doré, dans le Pacifique. Mais on trouve également des déchets sur quasiment sur toute la planète :

> dans le Pacifique nord-est : notamment tout près de la côte de la Californie et de la Basse-Californie, au nord-est des côtes hawaïennes et au nord du Golfe d'Alaska.

> dans l'Atlantique nord-ouest : tout du long de la façade Est des États-Unis (du Massachusetts jusqu'en Caroline du Sud) et plus loin à l'Est de ces côtes, en plein océan.

> dans le golfe du Mexique : entre la Louisiane et Cuba.

> dans l'Atlantique nord-est et la Manche : plusieurs sites d'immersions sont situés très loin des côtes anglaises, françaises et espagnoles, à 1 km de profondeur. Toutefois, quelques-uns ne sont pas si loin, comme les fûts de résidus radioactifs jetés à 15 km au nord-ouest du cap de la Hague. A 100 m de profondeur y reposent 20.000 fûts pour 17.000 tonnes de déchets nucléaires.

> dans la Méditerranée : plusieurs navires transportant des résidus radioactifs ont été sabordés en pleine eau par la mafia calabraise, surtout autour des côtes italiennes.

> dans l'océan Indien nord-ouest : après un tsunami en 2004, des déchets nucléaires (et plus) se sont échoués sur les plages somaliennes, ce qui suppose l'existence d'un trafic de déchets toxiques au large de l'Afrique.

> dans l'Arctique : dans la mer de Barents, non loin du littoral norvégien et estonien, et surtout au nord de la Nouvelle-Zemble.

> dans le Pacifique ouest : au nord et au sud du Japon, ainsi qu'au nord de la péninsule de Kamtchatka (Russie).

Et la liste continue. Officiellement, 14 pays (l'Angleterre la première, la France, la Belgique, mais aussi la Suisse) ont, en 36 ans de pratique (de 1946 à 1982), délibérément souillé nos océans de déchets radioactifs dans plus de 80 zones d'immersion à travers le globe.

Par Andriatiana RakotomangaPublié le 31/08/2017