Les premiers bains de mer en France
Au début du 19ème siècle encore, peu de gens s'intéressaient aux plages qui bordaient le littoral français. On peut imaginer que certains aimaient à s'y promener, mais on était très loin du phénomène de masse que l'on connaît de nos jours. Il faut attendre les années 1820 pour que les séjours à la plage suscitent un réel engouement : et c'est à Dieppe que tout commença.
De la diligence à la voie ferrée
A l'époque, il faut 15 heures en diligence pour relier Paris, la capitale, à la ville de Dieppe, en Normandie. Dès 1824, cette petite commune située en bord de mer accueille un établissement de bains, construit par son sous-préfet, le compte de Brancas. La duchesse de Berry est l'une des premières à s'y rendre et apprécie son séjour au point d'y retourner chaque année. Elle aime s'y baigner (toute habillée) et lance une certaine mode chez les aristocrates.
A Trouville, en revanche, c'est le calme plat, à tel point que l'écrivain Alexandre Dumas peut s'y baigner nu. Quelques artistes s'y rendent néanmoins et plusieurs peintres immortalisent la plage, faisant alors (malgré eux ?) la publicité de cette petite ville dans le tout-Paris. En 1834, Trouville devient furieusement tendance.
Second Empire : l'arrivée du train et la découverte du littoral
Le développement du chemin de fer en France va permettre de rejoindre plus facilement les villes de bord de mer. En 1848, il ne faut plus que 4 heures pour aller à Dieppe depuis Paris. Les plages normandes connaissent un succès grandissant : Deauville, Cabourg, Houlgate...
Le train descend encore plus bas et permet de découvrir de nouvelles stations balnéaires, comme Granville, Royan ou Arcachon.
Le Pays-Basque n'est pas en reste avec les visites régulières de l’impératrice Eugénie à Biarritz. Dès 1854, celle-ci y retrouve les parfums de son enfance, entraînant avec elle toute l'aristocratie de l'époque.
Il faut attendre encore quelques années avant qu'on ne s'intéresse aux pays de la Loire. Fin 19ème, Camille Flammarion invente à Pornichet la plage des Libraires, où se pressent de nombreux écrivains. Le Croisic voit arriver le train en 1879, avec ses voyageurs curieux d'y fouler le sable. D'autres préfèrent séjourner à la Baule, où s'organisent courses hippiques et fêtes de toutes sortes.
Le nouveau siècle voit naître de nouvelles plages
Au début du 20ème, le Pas-de-Calais connaît ses inconditionnels, que ce soit à Boulogne, Malo-les-Bains ou encore le Touquet. On y installe des cabines de plage et des petites échoppes de glaciers. La Bretagne dévoile également ses trésors : la plage de Dinard est l'une des plus fréquentées.
Il faudra laisser passer la Première Guerre Mondiale pour que le sud de la France attire les touristes. Jusque-là, seule une certaine aristocratie anglaise puis française s'y rend de temps en temps, et principalement en hiver. Nice et sa gare, Cannes et sa Croisette, Monte-Carlo et son casino... Ce n'est que dans les années 1930 que la Côte d'Azur accueille ses premiers estivants. Les aristos cèdent leur place aux bourgeois, impatients de goûter aux plaisirs du Sud dès les beaux jours. A Marseille, la plage se démocratise et devient un lieu de retrouvailles très populaire dès les années 20.
Les mêmes plages mais pas les mêmes plaisirs
Si les grandes stations balnéaires françaises d'aujourd'hui ont connu très tôt un grand succès, on ne peut pas dire que les activités y étaient les mêmes. Le maillot de bain a tardé à se faire connaître. Au début du 20ème siècle, il convient de rester habillé et d'éviter le contact direct avec le soleil : le bronzage, réservé aux paysans, est encore assez vulgaire. Les cabines se hissent parfois sur de grandes roues, pour faciliter leur déplacement.
Les activités nautiques se limitent à quelques bains (avec des vêtements longs) et à la pêche à la crevette. Dans les années 30, les plus jeunes peuvent garder le torse nu, les jeux de plage font leur apparition : la société des loisirs est en marche. Les premiers congés payés en 1936 vont définitivement lancer la grande mode des vacances à la plage.
Car s'il y a bien un élément commun à toutes les époques, c'est cette recherche d'une certaine douceur de vivre, un bien-être naturel entretenu par la proximité de l'eau. En quelques décennies, les plages ont parfois changé de nom, d'allure et de visiteurs, mais elles ont gardé pour beaucoup leurs charmes et leurs mystères.