Luchini à la plage

Le comédien Fabrice Luchini n'est pas un grand fan de la plage. Les plaisirs du bord de mer le dépassent un peu. Sur l'île de Ré, tel un ethnologue devant un nouveau peuple, il donne sa vision drôle et décalée d'une journée à la plage.

On se demanderait presque ce qu'il fait là : Fabrice Luchini, grand amoureux de l'île de Ré (Charente-Maritime), s'étonne pourtant de l'affluence estivale sur les plages. Pour lui, l'île est finie. Les jet-skis sont le symbole de cette fin de règne, où "les bourges sont niqués". Avant de préciser qu'il ne crache pas dans la soupe (en verlan par cet amoureux des mots) et qu'il fait lui-même partie de ces bourgeois qui débarquent sur l'île. D'où son inquiétude, notamment devant la montée de Besancenot et la dictature de la classe ouvrière : "Si j'avais un amour absolu du prolétariat, j'irais à Palavas".

Pour Luchini, l'île de Ré est un témoignage de la vie d'une certaine bourgeoisie de droite. Évitant de fréquenter les plus simples, ironisant sur les riches, l'acteur ne sait finalement plus très bien où se placer. Même pas sur la plage. Un simple torse nu le stupéfait : "Lui, il a décidé d'enlever le t-shirt, il y a une décision. Tout est mystérieux. Pourquoi cet homme a décidé, en déglingue totale, d'enlever le t-shirt ? ". Et bien cher Fabrice, peut-être parce que ça se fait, à la plage ! C'est même probablement le seul endroit public et naturel où c'est encore possible. Un vrai geste de liberté.

Pourtant, pour l'acteur, ce simple effeuillage partiel et libérateur serait le signe d'un profond mal-être : "C'est un bourge mais il a l'air déprimé. (...) Il en a marre, il est en super dépression. D'ailleurs l'acte de désinhibition d'enlever le t-shirt, c'est le premier symptôme d'une déglingue. (...) C'est comme moi, c'est 24 Lexomil le matin".

Mais non, Fabrice, tout le monde n'est pas comme vous. Cet homme a enlevé son t-shirt précisément parce qu'il veut aller bien. Il veut profiter des éléments sur son corps vieillissant : le soleil, le vent. Et si vous tentiez, vous aussi, de vous détendre, d'enlever vos vêtements et vos certitudes, de plonger les orteils dans le sable chaud, de fouler les vaguelettes du bord de l'eau. Vous devriez essayer, un jour, ça fait tellement de bien.

Publié le 01/01/1970