Survivre en mer est-il vraiment possible ?

De temps en temps, l'on entend des histoires de naufragés qui ont passé un, deux, voire trois mois en mer et qui, après coup, sont retrouvés sans grandes séquelles de leurs aventures. Cela donnerait presque une vision sans gravité d'un naufrage, mais en réalité, est-ce si facile de survivre en plein océan ?
Survivre en mer est-il vraiment possible ?

Le premier à avoir voulu savoir s'il était réellement possible pour l'Homme de survivre en pleine mer est le français Alain Bombard. Ce docteur en biologie humaine, mort en 2005, était en effet persuadé que cela était tout à fait possible, même avec un minimum de ressources. Et comme le dire ne suffisait vraisemblablement pas, il décida de le démontrer lui-même en se faisant naufragé volontaire en Atlantique.

Seul avec L'Hérétique

L'Hérétique est un canot gonflable de 4,6 mètres dans lequel Alain Lombard traversa l'Atlantique, seul et sans vivres. Dans un premier temps, il partit du Musée océanographique de Monaco, accompagné d'un navigateur nommé Jack Palmer. Une quinzaine de jours plus tard, la tentative est avortée et un cargo est dévié de sa route pour ravitailler les deux compères.

Quelques mois plus tard, le 13 octobre 1952, le docteur réitère son expérience et part en solitaire, cette fois-ci de Las Palmas, une province autonome au large de l'Espagne, direction plein ouest.

L'Hérétique lui offre un abri, il est équipé d'une voile lui permettant de fendre plutôt confortablement les flots. En revanche, il n'a pour se repérer qu'un sextant. En outre, il est parti sans vivre ni eau, avec juste un nécessaire de pêche et un filet à plancton. Le naufragé volontaire survécut pourtant bel et bien, et atteignit la Barbade quelque 65 jours plus tard, non sans avoir été recueilli une fois à bord d'un cargo pour y prendre un repas vers la fin de son voyage.

Il avait toutefois réussi à prouver que l'on pouvait effectivement survivre en mer, du moins le temps de traverser un océan, même dénué de tout.

Les règles élémentaires de survie en mer

Alain Bombard avait écrit "Un moral de fer peut sauver de la mort". Ce pionnier a ouvert la voie à un monde que d'autres après lui défricheront et amèneront à un niveau de connaissance quasi scientifique.

Le docteur a survécu en buvant de l'eau de mer en petites quantités, en récupérant l'eau de pluie et en buvant l'eau contenue dans les poissons qu'il pêchait. Il se nourrissait également de plancton, ce qui lui a permis d'éviter le scorbut, le plancton étant une très bonne source de vitamine C. Son histoire a permis de dégager 3 paramètres essentiels pour augmenter drastiquement les chances de survie :

1. L'abri : pour se protéger du soleil et des intempéries.
2. La nourriture : conserves, aliments lyophilisés, etc. Il faut rassembler tout ce qui se mange avant de passer au poisson cru et au plancton.
3. L'eau : à défaut d'eau douce, l'eau salée permet d'éviter la déshydratation, mais elle abîme vite les reins et ne doit pas être bue 7 jours d'affilée.

Quelques conseils à ne pas négliger

En complément, pour survivre à un naufrage en plein océan, on peut aussi conseiller de :

> Ne pas vider le poisson à même l'embarcation. Si l'odeur attire des prédateurs, vous ne voulez pas qu'ils vous suivent à la trace.

> Ne boire l'eau de mer qu'en ultime recours, après 72h sans boire, faute d'eau de pluie ou de poissons. Il ne faut pas en boire plus de 80 cl par jour aussi, et ne le faire qu'à petites gorgées espacées de 2 heures. On peut aussi bricoler un petit système pour dessaler l'eau par évaporation. Peu efficient, mais peut sauver une vie.

> Se tenir occupé. L'oisiveté amène au désespoir, surtout en solitaire, et avoir le moral en berne est quasi synonyme d'abandon. Même Bombard, sous un soleil de plomb et souffrant d'hémorragies rectales et buccales, a jeté l'éponge, un samedi 6 décembre 1952, au point d'écrire son testament sur son carnet de bord.

> Être visible afin d'attirer l'attention des secours, même un petit miroir peut faire l'affaire.

> Ne pas penser s'en sortir indemne. Un naufrage est une épreuve où la faim côtoie la soif, le froid et l'anxiété. Bombard, par exemple, est arrivé anémié à la Barbade, avec 25 kg en moins. L'accepter et s'endurcir, c'est faire un pas immense vers la survie.

> Enfin, être proactif et chercher un moyen de rejoindre une terre ou une zone de passage sans attendre les secours. Une attitude passive est aussi mortelle que l'hypothermie.

Par Andriatiana RakotomangaMis à jour le 17/02/2022