Le scandaleux massacre des globicéphales aux îles Féroé

Les îles Féroé, collectivité autonome du Royaume du Danemark, pratiquent tous les ans la chasse traditionnelle au dauphin, le grind. L'abattage des cétacés et les images d'eau de mer teintée de sang ont ému la communauté internationale. L'association Sea Shepherd est en première ligne pour faire cesser cette tradition.
Le scandaleux massacre des globicéphales aux îles FéroéPhoto : Laura Bâlc

Les îles Féroé, leurs fjords, leurs étendues naturelles, leur prairies boréales. Cet archipel de 18 îles n'est pas sans rappeler l'Islande, dont la langue est très proche et dont elle partage les origines Viking.

Mais c'est un autre aspect de la culture féringienne qui a le plus contribué à la renommée de l'archipel. La chasse au globicéphale était une pratique autrefois assez répandue dans les contrées scandinaves dont les terres se prêtent peu à l'agriculture. Elle se pratique toujours aux îles Féroé et provoque chaque année l'émoi parmi les amoureux des animaux.

Le grindadráp

En féroïen, ce mot signifie littéralement "mise à mort des baleines", même si dans la pratique cette chasse concerne les dauphins-pilotes. Ces cétacés vivent dans les eaux froides des océans arctique et antarctique. Les groupes peuvent atteindre plusieurs centaines d'individus. Ils nagent souvent à quelques mètres devant la proue des navires, ce qui leur a valu le nom de dauphins-pilotes.

Cette chasse au dauphin est attestée depuis 1584, mais est probablement plus ancienne. Elle se pratique toute l'année, avec cependant une acmé pendant l'été, lorsque d'importants groupes de cétacés migrent à proximité de l'archipel. La chasse suit une séquence bien précise, au cours de laquelle les cétacés sont rabattus vers les fjords par des navires puis mis à mort à l'arme blanche et dépecés sur la plage.

Une tradition controversée

Depuis quelques années, cette chasse fait l'objet d'une importante attaque de la part des associations écologistes.Traditionnellement, quelques dizaines de dauphins étaient tués à chaque chasse. De nos jours, sonars, GPS et téléphones portables permettent la capture et l'abattage de plusieurs centaines de dauphins en une seule fois. Les images choc d'eau teintée de rouge par le sang des cétacés et le mode d'abattage cruel des individus devant leurs congénères qui comprennent quel est le sort qui leur est réservé ont marqué l'opinion publique internationale.

Les autorités féringiennes défendent cette tradition, en arguant notamment du fait que la viande est consommée. Cet argument est démenti par la découverte de nombreux restes de dauphins au fond des fjords féringiens, démontrant que de très nombreux animaux ne sont pas consommés dans la pratique. Le fait que l'approvisionnement des îles ne dépend plus, comme autrefois, de la chasse au dauphin, rend d'autant plus caduque cette chasse archaïque aux modalités contraires aux conventions internationales en la matière.

La lutte contre le carnage s'organise

L'archipel est sous souveraineté danoise depuis 1386, mais la mère patrie lui a accordé en 1948 l'autonomie à l'intérieur du royaume danois. Les accords internationaux signés par le Danemark, et notamment la Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe, ne s'y appliquent pas, ce qui explique la difficulté à lutter sur le plan légal et le choix par les associations écologistes de méthodes plus musclées.

L'association la plus en pointe dans la lutte contre le massacre des globicéphales aux îles Féroé est Sea Shepherd. Celle-ci a mené avec succès plusieurs campagne de boycott des produits halieutiques féringiens. En 2011 et 2014, Sea Shepherd a fait intervenir ses navires dans la zone de pêche et a fait échouer pratiquement en totalité les massacres du grindadráp.

D'autres personnes, plus prosaïques, cherchent un argument plus pacifique et, peut-être, plus convaincant pour les autorités féringiennes. Les cétacés sont en effet au sommet de la chaîne alimentaire. Ils concentrent donc une grande quantité d'arsenic et de métaux lourds, qui ont déjà entraîné l'empoisonnement d'un certain nombre de Féringiens.

Davantage que par la pression de l'opinion publique internationale, cette tradition prendra peut-être fin sous les coups des normes sanitaires.

Par Charles LorrainPublié le 20/07/2016