Le Doggerland, pont caché entre l'Angleterre et le continent

Il y a huit mille ans, un terrible tsunami a englouti une partie de l'Europe que l'on commence à peine à redécouvrir : le Doggerland. Cette étendue de terre, qui reliait l'actuelle Grande-Bretagne au continent européen, a abrité des forêts, des animaux, et mêmes des populations humaines. Des scientifiques commencent à peine à explorer cette Atlantide européenne et à en dévoiler les secrets.

Et si l'on vous disait qu'il était possible de traverser la Manche à pied ? Ceux d'entre nous qui entretiennent un solide mal de mer seraient ravis de pouvoir aller manger des fish and chips sans les régurgiter pendant le voyage de retour. Aussi improbable que cela puisse être, faire une grande randonnée de Paris à Londres était pourtant possible il y a dix mille ans : il suffisait d'emprunter le Doggerland, une immense étendue de terre aujourd'hui immergée.

Des indices d'occupation humaine

Le Doggerland était une masse terrestre permettant à la Tamise de se jeter dans le Rhin. Si la fonte des glaces a fait disparaître ce lieu aujourd'hui oublié, l'Homme a déjà parcouru les forêts et les collines qui parcouraient ce territoire. En effet, un crâne de mammouth laineux a été repêché au large des Pays-Bas en 1999, première preuve que la vie animait le Doggerland. Plus tard, ce sont des outils – et notamment des pièges à poissons ou encore une pioche sculptée dans du bois d'élan – qui ont été exhumés des flots. Le Doggerland n'a pas seulement été le témoin de l'occupation humaine : il a été habité et exploité à une époque où l'Homme avait déjà découvert les bienfaits de l'agriculture.

Le destin tragique du Doggerland

Mais qu'a-t-il bien pu se passer pour que l'on abandonne le Doggerland ? La réponse des scientifiques est unanime. Tout d'abord, la fonte des glaces a peu à peu fait monter le niveau des océans, qui commencèrent à recouvrir le Doggerland il y a vingt-deux mille ans. Cette lente ascension des flots continua jusqu'à la fin du 6ème millénaire avant notre ère, lorsque la Grande-Bretagne put, enfin, devenir une île.

Cependant, les malheurs du Doggerland ne se sont pas arrêtés là : en 6200 av. J.-C., un glissement de terrain en Norvège provoqua un gigantesque tsunami. Celui-ci frappa de plein fouet les terres encore présentes entre le continent et les îles britanniques. Elles furent dévastées en un instant, mettant immédiatement fin à la vie animale et humaine qui subsistait sur les îles et bandes de terre qui avaient survécu à la fonte des glaces. La civilisation du Doggerland, si elle a existé, s'est donc tragiquement et brutalement éteinte.

Un continent perdu qui se dévoile

Ce sont désormais des équipes de scientifiques hyper-motivés qui se lancent à l'assaut de ce véritable continent perdu afin d'en percer les secrets. Le professeur Vincent Gaffney, de l'université de Bradford, est notamment à la tête d'experts afin d'obtenir des informations sur ceux qui ont vécu au Doggerland il y a plusieurs milliers d'années. Ils ont déjà réussi à prouver que les plages du sud de l'Angleterre ou de la Normandie étaient autrefois recouvertes de forêts habitées, de campements et même de grottes. De quoi donner à vos prochaines vacances au bord de la Manche une toute nouvelle dimension !

Le Doggerland a également donné naissance à une formidable coïncidence. Alors que les Britanniques ont décidé de lancer le processus du Brexit, il semble que leur île ait déjà décidé de quitter l'Europe il y a plus de huit mille ans. Comme quoi, ce désir d'indépendance est ancré très, très profondément dans les consciences de nos amis d'outre-Manche…

Par Thibaud PotronPublié le 13/09/2018